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Accord avec le Rassemblement national (RN) en vue de lui faire gagner « absolument » 300 villes lors des municipales en 2026, mise à disposition de toutes les droites extrêmes un arsenal de moyens visant à la « victoire électorale », constitution d’une « réserve » d’un millier de profils aptes à exercer le pouvoir après une victoire à la prochaine présidentielle, création de baromètres destinés à influencer le débat public et à élargir la « fenêtre d’Overton » toujours plus pour les idées réactionnaires et ultra-libérales, « guérilla juridique » contre les défenseurs de « l’extrême gauche », du « socialisme », du « wokisme », de la « laïcité agressive », etc.
Révélé dans nos colonnes en juillet 2024, Périclès, le business-plan du milliardaire catho conservateur Pierre-Édouard Stérin visant à faire gagner les droites extrêmes dans les têtes et dans les urnes, s’est imposé ces dernières semaines au cœur des échanges de la commission parlementaire sur l’organisation des élections en France.
« Je suis ravi de voir qu’on intéresse autant “l’Humanité”. »
Arnaud Rérolle, directeur général de Périclès
Après avoir tenté l’esquive en avril, Pierre-Édouard Stérin sera entendu dans le courant de la semaine prochaine. Mais dès ce mardi 6 mai, c’est Arnaud Rérolle, son bras droit à la tête de Périclès, qui a été soumis, sous serment, à un feu roulant de questions sur la nature profonde du projet et certains des détails du plan.
Que doit-on retenir de cette audition de près de trois heures ? L’Humanité en dresse un inventaire exhaustif, voire plus que ça… Car, comme le glisse non sans acrimonie le directeur de Périclès vers la fin des débats, « ce journal a écrit une trentaine d’articles sur Périclès depuis notre lancement. Malheureusement, tout le monde ne lit pas l’Humanité, et c’est bien dommage. Mais en tout cas, je suis ravi de voir qu’on intéresse effectivement autant l’Humanité. »
Une convocation qui ne sort pas de nulle part
En ouverture de la séance, Thomas Cazenave, député macroniste et président de la commission sur l’organisation des élections, justifie les convocations qu’il a adressées à Pierre-Édouard Stérin et Arnaud Rérolle. Avec Périclès, il s’agit, observe-t-il, de « structurer un véritable écosystème d’actions d’influence et de conquête politique ».
Avant de développer en se basant sur le document révélé par notre journal : « Ce projet affiche l’ambition de peser sur le paysage politique français, sur les échéances électorales à venir. Il vise à obtenir – j’ouvre les guillemets – “une victoire électorale en identifiant des candidats”, en mettant à leur disposition “tous les outils nécessaires : big data, médias, ressources humaines, financement.” Ces éléments soulèvent des interrogations légitimes au regard des travaux de la commission d’enquête. En effet, aujourd’hui, les personnes morales, en dehors des partis politiques, ne peuvent ni directement ni indirectement participer au financement des campagnes électorales. »
La commission s’appuie notamment sur une audition précédente au cours de laquelle Jean-Philippe Vachia, le président de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (CNCCFP), avait lâché : « Je ne connais ce projet Périclès que par les articles que nous avons pu lire. Je ne suis pas sûr que les initiateurs, les rédacteurs de ce projet aient une connaissance parfaite de la législation des campagnes électorales et du financement des partis politiques. J’ai même l’impression qu’ils l’ont totalement oublié et qu’ils se pensaient dans un monde anglo-saxon, même pas anglais, mais américain. »
Circulez, y a rien à voir ? Voire !
Dans son propos liminaire, au cours duquel il décrit Périclès comme une « manière structurée de soutenir et de faire émerger des initiatives citoyennes promouvant dans le débat public des valeurs libérales et conservatrices », Arnaud Rérolle, son directeur général, se veut catégorique : « Nous connaissons parfaitement le code électoral que vous avez évoqué et nous nous conformons partout dans nos actions à ce que la loi autorise dans ce domaine. » Sans rire, le même ajoute : « Je pense que la particularité de notre démarche tient notamment à la grande transparence que nous souhaitons avoir. »
Avant de tenter une diversion en appelant la commission à entendre aussi deux grandes – mais bien moins que celle de Stérin (1,4 milliard d’euros) – fortunes, engagées à gauche ou au centre-gauche : Olivier Legrain, accusé d’avoir financé la « primaire populaire » en 2021-2022, et Matthieu Pigasse, soutien affiché du Nouveau Front populaire (NFP) en juin dernier. Diversion qui sera prolongée plus tard dans le débat par le député ciottiste Maxime Michelet : « Certes improbable, l’audition de George Soros ne manquerait pas d’être intéressante puisque sa fondation a distribué pas moins de 1,7 milliard d’euros en 2022 à divers organismes européens marqués à gauche. »
À ces distractions répandues systématiquement par les droites extrêmes dès que le nom de Pierre-Édouard Stérin apparaît, le député insoumis Antoine Léaument, rapporteur de la commission, répondra par une suggestion en toute fin de séance : « Vous avez parlé d’un certain nombre de milliardaires qui défendraient des idées plutôt à gauche. C’est aussi un sujet d’intérêt. Sans doute, malheureusement, pas pour cette commission d’enquête, mais peut-être pour une autre qui, mise en place, pourrait étudier les ingérences financières. »
Quand le plan Périclès devient le « document de l’Humanité »
Si la commission a jugé indispensables les auditions de Pierre-Édouard Stérin et Arnaud Rérolle, c’est, comme le rappelle Antoine Léaument, parce que « l’Humanité a rendu public un document dans lequel plusieurs éléments nous ont intéressés particulièrement en lien avec la question du financement des élections ». Le rapporteur de la commission synthétise le triple objectif de Périclès – « victoire idéologique, victoire politique et victoire électorale » – et tout en commençant à égrener ses méthodes qui vont de campagnes de « décrédibilisation » des idées adverses à du