Omar Radi, a Moroccan journalist, was imprisoned for four years on charges of rape and espionage, which he believes were politically motivated to silence his criticism of the Moroccan government. He alleges the initial charges of threatening national security failed, leading to the alternative accusation of rape, a tactic he sees as an attempt to discredit him using the 'cancel culture' model.
Radi describes his time in prison, including solitary confinement, limited access to activities, and the challenges of navigating the Moroccan prison system. He highlights the pervasive control of information and the suppression of critical voices within the Moroccan media landscape.
Radi argues that the Moroccan government's intense aversion to criticism stems from the integration of intelligence services into media control. This, he claims, has led to the silencing of most critical journalism, leaving only a few marginalized outlets and creating space for online citizen journalism abroad. He cites the 2011 February 20 movement and the 2017 Hirak movement in the Rif as pivotal moments that spurred increased government control.
Radi discusses the impact of his imprisonment, noting that while physically unharmed, he's become more cautious in his expression. He views the repression of journalistic freedom as a global issue, not limited to Morocco, and calls for increased international collaboration to defend press freedoms.
Radi acknowledges the royal pardon that shortened his sentence but points out its inadequacy in the face of the damage done to his career and reputation. While he feels somewhat free, he admits he's under surveillance and recognizes he faces risks for continuing his work. He connects his case to broader political events such as the normalization of relations between Morocco and Israel.
Oui. Les premières charges n'ont rien donné, alors ils sont passés au plan B, c'est-à-dire l'accusation de viol. Je pense que leur logique était : si on l'accuse de faire ce qu'il fait, il va devenir un héros. Alors ils se sont inspirés de la cancel culture (culture de l'annulation, NdlR) et du mouvement Me Too, qu'ils ont instrumentalisés. Ils ont choisi des accusations sexuelles pour essayer de m'annuler, pensant qu'elles ne seraient pas propices à mobiliser dans l'opinion publique. Sauf que ça n'a pas marché. Il a suffi aux gens de regarder ce qui se passait pour comprendre que c'était une vengeance, un affreux scandale. Les gens ne sont pas dupes.
Dénonciation du lobbying de Rabat, appel à respecter la liberté de la presse... Le Parlement européen hausse le ton face au MarocJ'ai fait la moitié de la peine à Casablanca et l'autre à Tiflet, à une heure à l'est de Rabat. J'étais à l'isolement, ce qui est considéré comme un privilège. J'étais seul, plus surveillé et plus fouillé que les autres. Comme tous les prisonniers au Maroc, j'avais des visites, une fois par semaine, et des coups de fil. J'avais une radio et accès à des livres. J'avais aussi la télé marocaine… mais j'appelle ça une circonstance aggravante. J'ai demandé à pouvoir jouer de la guitare et de l'oud, à travers le Conseil national des droits de l'homme. J'avais appris à en jouer avant et j'avais peur d'oublier. J'ai obtenu de jouer deux heures par semaine, mais ça n'a pas duré longtemps.
L'explication la plus plausible, c'est qu'à un moment donné, on a confié la presse, l'espace public en général, au renseignement, c'est-à-dire à la police. Or, la police a un mode de raisonnement qui est basé, comme partout dans le monde, sur la sécurité, l'ordre, la répression. On a donc confié un domaine de liberté à des gens qui ne se soucient pas de tout ce qui fait la liberté, c'est-à-dire l'expression, l'activisme, le rassemblement, la mobilisation. C'est incompatible.
guillementLes journalistes sont au front de la répression, pas seulement en Palestine mais désormais aussi à Washington."
On a tué tout un secteur : 99 % de la presse marocaine règle des comptes, au nom du renseignement. Ce sont des attaques, des accusations, des insultes, contre d'autres agences, des personnes du pouvoir, des gens comme moi, des intellectuels de Rabat, des associations de droits humains, comme Amnesty ou Human Rights Watch. Au lieu de me soutenir, les médias ont relayé le mensonge, exposé mes parents et mes amis, attaqué ceux qui ont pris la parole pour me défendre. Ils ont joué le rôle que joue un agent du renseignement, c'est-à-dire intimider, réprimer, etc.
Je crois que ça a été graduel. En 2011, il y a eu le (mouvement de contestation) du 20 février, au début des printemps arabes. Il y avait une presse en ligne naissante, qui venait de la presse papier et qui était en quête d'espaces de liberté. Ces gens avaient une longueur d'avance par rapport à la volonté de contrôle de l'espace public virtuel par l'État. Ce retard a été rattrapé par le soutien, la promotion et la création de plus de 1600 sites d'information pour noyer et décrédibiliser le travail des journalistes. Dans cette multitude d'offres journalistiques, aucune ne correspondait vraiment au standard du journalisme, et l'écrasante majorité avait un financement opaque. Puis, pendant le (mouvement populaire) hirak du Rif en 2017, le pouvoir a vraiment pris peur en raison de l'ampleur de la mobilisation. C'est à partir de ce moment qu'il a donné carte blanche au renseignement pour une supervision accrue de la presse, et de l'espace public en général, donc de toute possibilité de s'engager politiquement, de mobiliser, de se rassembler. Aujourd'hui, il reste deux ou trois enseignes critiques, qui ont été marginalisées. Elles font du bon contenu, mais elles ne s'aventurent plus sur certains territoires ni sur certains sujets. Il y a beaucoup d'autocensure. Quant aux journalistes, ils ne travaillent plus, il n'y a plus nulle part où écrire. Et donc ça laisse la place à tous les youtubeurs qui vivent à l'étranger, ce sont eux qui font maintenant du journalisme citoyen.
Enquête pour corruption au Parlement européen: des journalistes et militants marocains demandent à être parties civilesLe risque c'était de sortir avec des séquelles psychologiques. Sur ce point tout va bien, j'ai fait toute une série d'examens. Mis à part ça, je crois que je suis plus posé, plus sage, c'est-à-dire moins impulsif, je prends plus mon temps. Je conçois le combat pour la liberté non pas comme quelque chose d'immédiat mais comme un combat au long cours. Et puis, ce n'est pas qu'au Maroc qu'il y a une régression, il faut prendre en compte la régression globale sur le plan des libertés, y compris aux États-Unis et en Europe. Nous sommes entrés dans une phase fasciste, où même le rôle des grands médias est remis en question. Tout cela appelle une réflexion générale sur le rôle du journalisme, où le mensonge n'est plus permis. Nous arrivons à un point critique de l'histoire de l'humanité où il s'agit d'un combat global pour la liberté.
guillementJe pèse plus mes mots qu'avant. Je le dis avec la mort dans l'âme, mais je pèse mes mots. Je continue à dire ce que je pense."
Les journalistes sont au front de la répression, pas seulement en Palestine mais désormais aussi à Washington. Ils doivent aussi mettre leur casquette d'activiste pour défendre leur espace de liberté. Il faut une réponse globale. Cela peut passer des organisations, mais aussi par beaucoup de networking. Et je crois que les pays du Sud devraient se connecter davantage parce qu'ils ont un rôle à jouer dans la défense des libertés.
Oui, parce que ça m'a économisé deux ans de prison. Par contre, j'ajoute que ce n'était pas trop tôt : quatre ans de prison, ce n'est pas rien. C'était une tentative délibérée de détruire une carrière, une réputation. Alors, que vaut une grâce, qui est l'un des plus grands honneurs pour un Marocain, face à une tentative aussi brutale ? Aujourd'hui, je ne peux plus exercer mon métier. Dans la loi marocaine, un casier judiciaire pénal vous empêche d'obtenir la carte de presse et sans cette carte, je ne suis pas reconnu comme journaliste.
Je me sens libre et je me sens en liberté surveillée. Je crois que je pèse plus mes mots qu'avant. Je le dis avec la mort dans l'âme, mais je pèse mes mots. Je continue à dire ce que je pense. Sur les risques, je ne sais pas. Personne ne sait ce qui a déclenché la volonté de m'arrêter. Je ne sais toujours pas pourquoi je suis allé en prison et je ne sais pas pourquoi j'en suis sorti.
C'est l'une des explications. C'est aussi le retour de l'autoritarisme avec le Covid. Concernant Israël, le pouvoir était censé dire aux Marocains qu'il avait renoué les liens mais j'ai précisé qu'il n'avait jamais cessé d'être en contact avec Israël. D'ailleurs, le Maroc avait acheté Pegasus (le logiciel espion israélien dont Omar Radi a été victime, NdlR) auparavant. Le simple fait de dire que le Maroc était en contact avec Israël depuis des années et des années a sans doute joué contre moi.
Maroc : trois journalistes et un intellectuel graciés par le roi Mohammed VIIf you often open multiple tabs and struggle to keep track of them, Tabs Reminder is the solution you need. Tabs Reminder lets you set reminders for tabs so you can close them and get notified about them later. Never lose track of important tabs again with Tabs Reminder!
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