Au jeu de La Bonne Paye, vous perdiez votre salaire à tous les coups ? Une version du jeu, revisitée par la Banque de France, vise au contraire à apprendre à ne pas en perdre. Jeudi 20 mars 2025, à l’occasion de la Semaine d’éducation financière, des étudiants de Tours, avec peu de moyens, se sont lancés dans une partie de « Mes questions d’argent ». Invités par Armelle Audin, assistante de service social de l’université, les étudiants ont joué à comment gérer leurs finances.

Dans la résidence universitaire Rabelais du Crous, deux participants et trois assistantes sociales étaient assis autour du plateau de jeu. L’objectif : acheter une trottinette électrique à plus de 700 € avec 300 € au départ. Guidés par deux animateurs de la Banque de France de Touraine, ils devaient répondre correctement à des questions : gestion de budget, achats et dépenses, assurance, crédit et moyens de paiements. Puis faire grossir leur compte en banque.

« Je mange directement dans les boîtes de conserve »

Au-delà d’apprendre à épargner malgré des dépenses imprévues, les questions incitent les étudiants à réfléchir sur leurs habitudes : « Comment faire des économies avec des gestes simples chez soi. » Pour des étudiants précaires, ces gestes semblent si évidents que la réponse ne vient pas d’elle-même.

« Je coupe le chauffage quand je pars de chez moi et même le frigo s’il n’y a rien dedans », explique Louix. L’animateur acquiesce, « et puis j’arrête mes applications avant la fin de la période d’essai gratuite », l’animateur le coupe, ce n’était pas la réponse attendue. Il oriente la discussion sur l’usage de l’eau. Spontanément, l’étudiant en droit et langues lui répond : « Je ne fais pas la vaisselle, je mange directement dans les boîtes de conserve. » Raté. Mais des questions sur comment anticiper le paiement d’assurances ou sur les prérequis financiers pour être garant étaient moins évidentes.

Le jeu « Mes questions d’argent » imaginé par la Banque de France. © Photo NR, Charlotte Boutefeu

Ce jeu, c’était une première pour l’université, comme pour Louix qui retrouve depuis quelques mois une santé financière : « Je suis un très mauvais gestionnaire », admet-il. Avec une allocation handicap de 1.000 € par mois, Louix ne s’en sortait pas : « Tout l’hiver, j’étais à découvert sur deux comptes. » Deux mois de loyers non payés se sont ajoutés, et à 27 ans, il a dû déclarer une faillite étudiante pour réduire ses dettes.

« Anticiper les situations à risques »

Pour Louix, les apprentissages de ce jeu viennent compléter le nouveau regard qu’il porte sur ses problèmes financiers : « Avant, c’était la fête au village ! En un mois, j’ai dépensé 140 € d’UberEat. Maintenant, je sais qu’il faut discerner ce dont on a besoin, de ce dont on a envie dans l’immédiat. » En somme, ne pas tomber dans la spirale infernale des achats impulsifs dictés par les émotions.

Mais à l’Université de Tours, la situation de Louix reste assez rare. Ce sont des étudiants très modestes qui toquent à la porte d’Armelle Audin : « Plus de 50 % des jeunes qui viennent me voir ont des problèmes d’argent. » Alors, apprendre aux étudiants à gérer leur budget, Armelle Audin en fait une priorité : « Souvent ils n’ont pas reçu d’éducation financière de leurs parents. Et les étudiants les plus en difficulté sont souvent des étrangers primo arrivant, qui ne connaissent pas le système français. »

En septembre prochain l’assistante sociale invitera de nouveau la Banque de France pour « anticiper dès le début d’année, les situations à risque » et consacrera un moment à la sensibilisation sur les arnaques.